les recherches

Une histoire des Vaux relativement récente mentionne "une tour noire comme les ténèbres, aux gardiens ailés, haute et omnisciente".

Le récit d'un aventurier dont le manuscrit est en fort mauvais état raconte ceci: "Ayant fui le clan de trolls à travers la plupart des forêts denses de Valarchen, nous atteignîmes des collines pelées que nous pensions être notre rédemption. Mais nous étant arrêtés un temps pour soigner nos blessés, nous nous aperçûmes que les monstres étaient bien décidés à nous reprendre leur maudit bout de bois, et entamaient la poursuite au sein même de ces environs rocailleux. Nous les perdîment seulement deux jours plus tard. Et à ce stade, nous étions nous-mêmes complètement égarés.
Après trois jours d'errance, la faim nous tiraillant et le moral au plus bas, nous arrivâmes en vue d'une haute citadelle de pierre noire. Bien qu'elle ait l'air abandonnée, nous nous sommes rattachés au maigre espoir d'y trouver secours et nourriture.
Les ruines calcinées et ternies par le temps de ce qui dut être une bourgade prospère entouraient la forteresse. Je me souviens avoir été prit d'un long frisson la première fois que j'entrai dans l'ombre de l'énorme bâtisse. A y repenser, je ne pense pas que le frisson m'ait quitté avant que je n'en ressorte. Aux portes défoncées de la citadelle, perchée sur un surplomb rocheux, nous fîment une pause. Anagar était réticent à entrer dans cet endroit lugubre. Bien que nous sachions tous, je crois, au fond, qu'il avait raison, nous étions suffisamment désespérés pour tenter notre chance.
Nous allions le regretter amèrement.
[partie effacée] énorme hall, vaste comme une cathédrale et entrecoupé d'escaliers, paliers, portes, passages et arches de toutes sortes. Mais à présent, paire par paire, luisant à la lueur de la torche, aparurent un grand nombre d'yeux rouges nous encerclant de tous côtés. Faisant volte-face, nous découvrîment avec effroi un monstre reptilien, énorme, dressé sur ses pattes arrières, bloquant le seul passage vers la sortie. Melya hurla "Dragon!" et ce fut son dernier mot, alors que les talons affreusement acérés de la créature séparaient sa tête de son corps.
[longue partie effacée] mourut en défendant l'entrée du tunnel pour nous permettre de sortir. Nous entendîmes ses derniers râles au détour d'un embranchement de plusieurs couloirs. Quand enfin nous atteignîmes la surface, débouchant après une longue errance souterraine dans ce qui devait être il y a bien longtemps une chapelle à je ne sais quelle divinité oubliée, nous partîmes au plus vite et sans nous retourner, priant de ne plus jamais, jamais revoir les horreurs que nous avions vues ce jour-là."

Traduction depuis le vieux Mulhorandi du texte intitulé "La chute de Chéronte", par Siarenin Khaldei:

"Garwaminnaugar étendait le pouvoir de la forteresse éternelle par-delà les frontières de la réalité, puisant au coeur des ombres la force de dominer par la seule pensée un territoire plus vaste chaque jour. Les elfes de la Cour Elfique (ndt: situé dans la forêt de Cormanthor, où se trouvent aujourd'hui la région apelée les Vaux) reculaient sans cesse face aux assauts sanguinaires des puissants serviteurs du Seigneur de Cheronte. Rien ne semblait pouvoir enrayer son ascension.
Alors se présenta devant la Cour le chevalier Arathil de Vrabassac, celui à l'armure en carapace de dragon-tortue, vainqueur de maints géants et gardien des voies du juste. Avec lui venaient Shazi, sans nul doute la chasseuse de prime la plus réputée de Faerun, qui avait perdu un bras face à Garanagal, l'archimage renégat, et son compagnon Grizza; venait aussi Elija, écuyère d'Arathil au coeur vaillant et à la parole toujours vraie; venait aussi Ysen Marteaugriffon, fils d'Ylen Marteaugriffon, le Roi du pays nain de Profondréfuge, héritier des traditions glorieuses et de la fureur au combat de ses illustres ancêtres. Arathil parla alors à Siolan Doux rameau Evensil, qui dirigeait les troupes elfes menées contre Cheronte, et ils échangèrent ces paroles qui devinrent légende:

"Salut à toi et au noble peuple elfe de Cormanthor, Ô Siolan, défenseuse de Thor Myrith et vaillante parmi les vaillantes. Ca faisait un bail."
"Salut à toi, répondit Siolan Evensil, Ô Arathil de Vrabassac, et à vous, Shazi et Grizza, et à toi Elija, et à toi Ysen fils d'Ylen. Vous êtes pas en avance, les gars."
"On a été retenus. C'est quoi le souci?"
"La sombre et obscure forteresse de Cheronte étend son pouvoir sur les environs. La puissance surnaturelle de son seigneur maléfique fait pâlir nos plus puissants magiciens. La menace qu'il fait planer dans ces contrées doit être contrée."
"Fais-nous confiance. Nous défendrons le noble royaume des elfes avec toute notre valeur", dit Arathil.
"Ouais, dit Ysen fils d'Ylen, on va le poutrer."

Lors de l'assaut suivant, une percée parvint à laisser champ libre aux preux héros jusqu'aux portes de la citadelle maudite. Ils disparurent dans ses méandres et le reste de l'armée elfe fut repoussée vers leurs retranchements. On n'eut aucune nouvelle d'Arathil et de ses compagnons avant le lendemain à l'aube, quand ils se présentèrent, hagards, au campement elfe. Ysen fils d'Ylen, guerrier à l'immortelle mémoire, et l'à-jamais regrettée Elija, ne revinrent pas avec eux; et bien que longtemps par après il fut tenté de retrouver leurs dépouilles afin de leur donner une digne sépulture, jamais elles ne furent retrouvées. Shazi semblait en proie à un état de choc pareil à rien de ce que les soigneurs elfes connaissaient, à la grande inquiétude de Grizza. Elle portait, enrobé dans une cape déchirée tachée de sang noir, un grand sceptre de fer froid, orné d'un squelette de dragon forgé de manière à faire penser que la bête était perchée sur le haut du manche. Arathil dit que celui-ci avait été arraché des mains mêmes du Sombre Seigneur lors de leur affrontement et que bien que malgré leurs efforts ils ne purent le vaincre entièrement, ils le laissèrent blessé et dépourvu d'une partie de son pouvoir. Ils partirent alors tous trois vers l'ouest avec le sceptre, afin de le mettre hors de portée du Sombre Seigneur et de tous ceux qui voudraient l'utiliser pour leurs propres fins.

Privé de son sceptre de pouvoir, le Sombre Seigneur ne sut faire face à la magie des elfes et le règne du tyran noir s'acheva quelques semaines plus tard, treize années après l'apparition de Cheronte la maudite sur Faerun. Du sceptre, nul n'entendit plus jamais parler. Certes, d'autres despotes maléfiques eurent des règnes plus longs et delus vastes empires - mais la cruauté et la noirceur de celui du Sombre Seigneur marqueront les esprits de générations.

Quant à moi, j'eus l'occasion de revoir le chevalier de Vrabassac deux fois avant d'échanger mes dernières paroles avec lui, sur son lit de mort. Le récit des aventures qu'il me conta ce jour-là, et de celles que je vécus à ses côtés, remplira, j'en suis sûr, bien d'autres parchemins encore. Je me hasardai, lors de cet ultime entretien, à lui demander ce qu'il advint du sceptre de pouvoir volé lors de cette triste bataille. Il me répondit avec un sourire fatigué au lèvres.

"A toi, vieil ami, je peux le dire. Il fut enterré aux côtés de notre regrettée Shazi quand celle-ci succomba finalement à sa maladie, il y a sept ans de cela. Sa vie durant, depuis qu'elle trancha la main du Sombre Seigneur et lui arracha le symbole de son règne, elle défendit cet objet avec un acharnement enragé, digne de la mémoire de nos amis tombés ce jour-là. Quand elle se sentit partir, elle disparut, accompagnée seulement de son inséparable Grizza, et personne ne sait où elle choisit de prendre ses derniers quartiers." "

Ce texte date d'il y a environ 1400 ans, à plus ou moins cinq ans près.

Shazi avait entamé la dure carrière de chasseuse de prime très tôt. On ne sait pas exactement comment elle rencontra Grizza, un kobold qui devint célèbre pour sa ruse et ses artifices, et également son inséparable compagnon. Ensemble, ils participèrent à la capture de plusieurs criminels, ainsi que de nombreux monstres recherchés. Néanmoins, il devint aussi rapidement clair qu'ils n'étaient pas des mercenaires sans foi ni loi, mais qu'ils oeuvraient bien pour la cause de la justice. Lors d'un combat sans merci contre Garanagal, l'archimage renégat, elle eut le bras arraché par une main désincarnée invoquée par le sorcier félon. L'image la plus célèbre de Shazi qui ait été faite et conservée la représente sur les marches de la tour du mage, tenant la tête de celui-ci par les cheveux dans sa main restante, son bras arraché tranché à l'épaule.

Réputée pour avoir après cette mutilation développé un style de combat à une arme parmi les plus efficaces de son temps, Shazi n'a jamais été une duelliste; chez elle, tout reposait sur l'efficacité. Un style sans fioritures, où tous les coups cherchent à atteindre leur cible et où elle utilisait des éléments de l'environnement ou des objets disponibles pour créer l'effet de surprise. Elle n'a jamais, cependant, été taxée de sauvagerie - on la disait même douce, à tout moment. Technicienne de la capture, secondée par le maître-piégeur Grizza, elle poursuivit sa carrière, d'exploit en exploit.

Sa rencontre avec Arathil, alors simple aventurier parfaitement inconnu mais qui devint par la suite un grand guerrier réputé pour son grand coeur et chevalier de Vrabassac (les histoires divergent quant au royaume où se trouvait ce domaine), et leurs nombreuses associations par la suite, ont également fait l'objet de plusieurs chants.

A la fin de sa vie, on dit que Shazi, malade, partit mourir dans un endroit dont beaucoup voudraient connaître la localisation, accompagnée seulement de son fidèle Grizza. Les théories sont toutes plus farfelues les unes que les autres; certains prétendent qu'elle partit sur un autre plan, mais en vérité les histoires la décrivent surtout comme rebutée par la magie et le surnaturel. D'autres disent qu'elle partit pur l'Eternelle-Rencontre, là où partent les elfes, afin de rejoindre des amis à elle et mourir bien entourée. Mais la vérité, mon chr Zoubert, est bien plus simple...

... et je la connais. Vois-tu, avant de te rencontrer, j'avais un maître barde. Celui qui m'a tout appris. Et celui-ci, dans sa jeunesse, était parti en quête de maints éléments de récits célèbres, afin de les vérifier, ou de trouver de quoi enjoliver et enrichir ses chants en en vivant certains passages par lui-même. Il a trouvé la tombe de Shazi. Il ne m'en révéla pas l'emplacement exact - mais si tu le demandes gentillement, je peux certes te donner un indice d'une valeur inestimable.

Elle a été enterrée à Eauprofonde. Je ne sais pas exactement où, mais ça devrait t'aider.